le 7 novembre 2023
Report de la retraite : comment tirer profit de la diversité des âges en entreprise

Comme le montre la dernière enquête Workmonitor de Randstad, la flexibilité au travail est aujourd’hui au cœur des aspirations des travailleurs. Cette recherche de plus souplesse inclut le droit de travailler au-delà de l’âge de la retraite.

Selon une récente étude menée au Royaume-Uni, 80% des plus de 65 ans britanniques apprécient l’idée de travailler pendant leur retraite, une réalité aisément transposable aux autres pays européens. Les entreprises à la recherche de compétences peuvent compter sur ces retraités motivés par une reprise d’activité, mais doivent être prêtes à faire preuve de flexibilité pour répondre à leurs besoins individuels. Voici comment la tendance au report de la retraite peut aider les entreprises, les salariés et même les gouvernements à résoudre les problèmes actuels de main-d’œuvre.

 

Les conséquences de la baisse du taux d’actifs

La génération des baby-boomers a aujourd’hui entre 57 et 75 ans, et beaucoup d’entre eux sont sur le point de prendre leur retraite ou l’ont déjà prise. Cette situation, associée à la baisse du taux de fécondité depuis les années 1970, fait que le nombre de personnes quittant la tranche d’âge active est aujourd’hui supérieur au nombre de personnes qui la rejoignent. La diminution de la population en âge de travailler ne se traduit pas seulement par des déficits croissants de compétences et des pénuries de talents pour les entreprises ; elle peut également limiter la croissance économique et peser sur les systèmes de protection sociale.

Certains pays, comme le Japon, sont davantage touchés par le vieillissement de la population mais la plupart devront s’attaquer à ce problème dans les décennies à venir, selon Randstad. Et ce n’est pas seulement le problème des gouvernements et des entreprises : les difficultés économiques, l’inflation élevée et la baisse des aides publiques ont changé le regard des salariés sur le moment de leur propre départ à la retraite : 70% des personnes interrogées dans le cadre de notre dernière étude Workmonitor pensent qu’elles ne pourront pas prendre leur retraite aussi tôt qu’elles le souhaiteraient en raison de leur situation financière.

Un réservoir de talents expérimentés

C’est en partie pour des raisons financières que les personnes interrogées envisagent de continuer de travailler. En 2022, 61% des sondés pensaient prendre leur retraite avant 65 ans ; cette année, ils sont à peine plus de la moitié à le penser. Mais le travail ne se résume pas au salaire. Près d’un tiers des répondants du Workmonitor déclarent avoir besoin d’un travail dans leur vie, que ce soit pour l’aspect social, pour atteindre des objectifs ou simplement pour rester actifs. Midge Streeter, coach de carrière chez Randstad RiseSmart âgée de 72 ans, explique qu’elle choisit de toujours travailler par passion pour aider les talents à donner le meilleur d’eux-mêmes, quel que soit leur âge.

Travailler tous les jours m’aide à rester en phase avec les nouvelles technologies, les tendances économiques et les récentes méthodes pédagogiques.

Midge Streeter
Coach de carrière, Randstad RiseSmart

Certaines personnes souhaitent travailler au-delà de l’âge de la retraite ou reprendre une activité professionnelle après avoir pris leur retraite, et les entreprises devraient les accueillir à bras ouverts. Pourquoi ? En un mot : l’expérience. Des collaborateurs plus âgés peuvent apporter des compétences précieuses, explique Midge Streeter : « Les talents séniors offrent plusieurs avantages pour les employeurs, notamment une solide éthique de travail. Ces personnes ne sont jamais absentes, elles dépassent les attentes et, en équipe, leur influence rend leurs collègues plus performants. »

Selon le Dr Emily Andrews, Directrice adjointe au Travail du Centre for Ageing Better, au Royaume-Uni, l’expérience, les compétences et le regard qu’apportent les collaborateurs plus âgés sont très prisés par les employeurs. Ces derniers apprécient en particulier la diversité des points de vue et des comportements que des effectifs multigénérationnels peuvent créer, et les études le confirment : « Une étude de l’OCDE révèle que les entreprises dont la proportion de salariés de plus de 50 ans est supérieure de 10 % à la moyenne sont plus productives, tandis qu’une autre étude du German Economic Institute montre que les équipes multigénérationnelles sont meilleures en matière d’innovation », explique-t-elle.

L’expérience de nombreux défis relevés au cours des années peut forger d’excellentes capacités à résoudre des problèmes et développer une sagesse spécifique au secteur d’activité. En outre, des programmes de mentorat peuvent contribuer à préserver cette connaissance du secteur au sein de l’entreprise, en facilitant la transmission d’informations aux jeunes générations.

 

Faciliter le retour au travail

Pour résoudre le problème du recrutement de ces retraités qualifiés, certaines entreprises mettent en place un réseau d’anciens grâce auquel elles restent en contact avec leurs ex-salariés, laissant ainsi la porte ouverte au dialogue sur un potentiel retour au travail. En l’absence d’un tel réseau, mettre en avant, dans les annonces de recrutement, les avantages ciblant spécifiquement les seniors peut aider à trouver des personnes qui souhaitent « quitter la retraite » ou à identifier des associations qui œuvrent dans ce domaine.

« Contactez les associations dédiées aux seniors, comme l’AARP aux États-Unis, conseille Midge Streeter. Utilisez le bouche-à-oreille et les recommandations de vos salariés ; formalisez un programme dédié au ciblage de candidats seniors dans votre politique diversité ; et évitez les questions tendancieuses pendant les entretiens, qui peuvent être considérées comme une discrimination liée à l’âge. »

Le Dr Andrews souligne l’importance d’éviter les préjugés : « Une fois que les employeurs ont rédigé leurs offres d’emploi de manière à attirer les séniors, l’étape suivante consiste à s’assurer qu’aucun biais, dans le processus de recrutement, ne puisse nuire à l’embauche d’un candidat plus âgé. Notre guide « Good Recruitment for Older Workers » contient de nombreux conseils pour un processus de recrutement senior-friendly. »

Cultiver une atmosphère tolérante et accueillante au travail va de soi. Néanmoins, les entreprises peuvent souligner l’importance qu’elles accordent à leurs salariés les plus âgés afin de faciliter ce qui pourrait être une expérience intimidante pour certains.

De nombreux retraités s’occupent régulièrement de leurs petits-enfants, ont des rendez-vous médicaux ou veulent simplement lever le pied sans pour autant cesser toute activité.

Les entreprises faisant preuve de souplesse en matière d’horaires ou de lieu de travail sont plus attractives pour les séniors qui souhaitent travailler à temps partiel, ce qui leur permet d’élargir considérablement leur vivier de talents.

Dr Emily Andrews
Directrice adjointe au Travail au Centre for Ageing Better, Royaume-Uni*

Flexibilité pour le passage à la retraite

Certains talents peuvent envisager de prendre leur retraite prochainement, mais ne souhaitent pas pour autant passer du jour au lendemain d’un travail à temps plein à la retraite. Et certaines entreprises proposent déjà à leurs salariés des plans de transition leur permettant, en vue de leur future retraite, de réduire progressivement le rythme sur une période qui convient aux deux parties. 

Les entreprises empathiques et flexibles récupéreront les talents et prolongeront même la vie professionnelle de leurs salariés expérimentés.

En retour, ces salariés pourront combler le manque de compétences et former la prochaine génération, tout en améliorant leur situation financière et en continuant de trouver du sens et de la satisfaction au travail, aussi longtemps qu’ils le souhaitent.